by FEUSSOM | |
Published on: Oct 27, 2005 | |
Topic: | |
Type: Opinions | |
https://www.tigweb.org/express/panorama/article.html?ContentID=6460 | |
Grippe aviaire (“grippe du poulet”) et importance de la transmission à l’homme La maladie chez l’oiseau : impact et mesures de lutte La grippe aviaire, provoquée par une souche A du virus grippal, est une maladie infectueuse affectant les oiseaux. Identifiée pour la première fois en Italie il y a plus de 100 ans, elle survient dans le monde entier. On pense que tous les oiseaux sont sensibles à cette infection, bien que certaines espèces soient plus résistantes que d’autres. Elle peut avoir des symptômes très variés, allant d’une forme bénigne à une maladie très contagieuse et rapidement mortelle qui provoque de graves épidémies. On parle alors de grippe aviaire hautement pathogène, qui se caractérise par une apparition brutale, de graves symptômes et une évolution rapide vers la mort, le taux de mortalité pouvant avoisiner les 100 %. On connaît 15 sous-types de virus grippal chez les oiseaux qui constituent donc un vaste réservoir de virus pouvant potentiellement circuler dans les populations aviaires. A ce jour, toutes les flambées de la forme hautement pathogène ont été causées par des virus grippaux A de sous-types H5 et H7. Le gibier d’eau migrateur - notamment les canards sauvages - constitue le réservoir naturel des virus de la grippe aviaire. Ces oiseaux sont aussi les plus résistants à l’infection. Les volailles domestiques, poulets et dindes notamment, sont particulièrement sensibles aux épidémies de grippe rapidement mortelle. Le contact direct ou indirect entre les oiseaux domestiques et le gibier d’eau migrateur a souvent été à l’origine des épidémies. Les marchés d’oiseaux vivants ont joué également un rôle important dans la propagation. Des recherches récentes ont montré que des virus faiblement pathogènes peuvent, parfois après avoir circulé peu de temps dans une population de volailles, muter et devenir hautement pathogènes. Au cours de l’épidémie de 1983-1984 aux Etats-Unis d'Amérique, le virus H5N2, peu mortel au départ, est devenu hautement pathogène en six mois, avec un taux de mortalité avoisinant les 90 %. Pour endiguer cette épidémie, il a fallu sacrifier plus de 17 millions d’oiseaux et dépenser près de US $65 millions. Au cours d’une épidémie de 1999 à 2001 en Italie, le virus H7N1, faiblement pathogène à l’origine, a muté en 9 mois. Plus de 13 millions de volailles sont mortes ou ont été abattues. La mise en quarantaine des élevages contaminés et la destruction des volailles infectées ou potentiellement exposées sont les mesures classiques de lutte qui visent à éviter la propagation à d’autres fermes et l’installation du virus dans les populations de volailles d’un pays. En dehors de leur forte contagiosité, les virus grippaux aviaires se transmettent facilement d’une ferme à l’autre par des moyens mécaniques : matériel, véhicules, aliments, cages ou vêtements contaminés. Les virus hautement pathogènes peuvent survivre longtemps dans l’environnement, notamment si la température est basse. Des mesures sanitaires rigoureuses appliquées aux fermes peuvent néanmoins assurer une certaine protection. Si des mesures de lutte ne sont pas prises rapidement en s’appuyant sur une surveillance de qualité, les épidémies peuvent durer pendant des années. Une épidémie de virus H5N2 a ainsi commencé au Mexique en 1992. Faiblement pathogène au départ, elle a évolué vers une forme entraînant une mortalité élevée et n’a pas été endiguée avant 1995. Un virus en mutation constante : deux conséquences Tous les virus grippaux de type A, y compris ceux que l’on retrouve régulièrement à l’origine des épidémies saisonnières chez l’homme, sont génétiquement instables et bien adaptés pour échapper aux défenses immunitaires de l’hôte. Ils ne disposent pas de mécanismes de « repérage » et de réparation des erreurs qui se produisent pendant la réplication. Il en résulte que leur composition génétique change à mesure qu’ils se répliquent chez l’homme ou l’animal et une nouvelle variante antigénique remplace bientôt la souche de départ. On appelle « glissement » antigénique ces modifications constantes et en général mineures des virus grippaux A. Cette tendance des virus grippaux à subir en permanence des modifications antigéniques fréquentes oblige l’homme à surveiller constamment l’évolution de la situation dans le monde et à ajuster chaque année la composition des vaccins antigrippaux. Ce sont deux activités fondamentales du Programme mondial de l’OMS concernant la grippe depuis son lancement en 1947. Les virus grippaux présentent une seconde caractéristique très préoccupante pour la santé publique : les virus A, y compris les sous-types de différentes espèces peuvent échanger, c’est-à-dire « réassortir » leur matériel génétique et fusionner. Ce processus entraîne une « variation antigénique majeure » qui aboutit à la création d’un nouveau sous-type, différent des deux virus dont il est issu. Comme les populations n’ont aucune immunité contre ce nouveau sous-type et qu’aucun vaccin ne permet de s’en protéger, ces variations antigéniques majeures ont entraîné dans le passé l’apparition de pandémies avec une mortalité élevée. Pour qu’un tel événement puisse se produire, le nouveau sous-type doit avoir des gènes provenant de virus grippaux humains qui lui donnent la possibilité de se transmettre facilement et durablement d’une personne à l’autre. On a longtemps pensé que les conditions favorables à l’apparition de variations antigéniques majeures sont réunies lorsque l’homme vit à proximité immédiate des volailles et des porcs. Comme les porcs sont sensibles aux infections à la fois par les virus aviaires et les virus des mammifères, notamment les souches humaines, ils peuvent servir de « creuset » pour le mélange du matériel génétique des virus humains et aviaires et l’apparition d’un nouveau sous-type. Mais des événements récents ont permis d’établir un deuxième mécanisme possible. Des faits de plus en plus nombreux montrent que, pour au moins quelques-uns des 15 sous-types de virus aviaires circulant dans les populations d’oiseaux, c’est l’homme lui-même qui peut servir de « creuset ». Historique des infections humaines par des virus grippaux aviaires Les virus aviaires n’infectent pas normalement d’autres espèces que les oiseaux et les porcs. Le premier cas documenté d’infection humaine s’est produit à Hong Kong en 1997, lorsqu’une souche H5N1 a provoqué une affection respiratoire sévère chez 18 personnes et la mort de 6 d’entre elles. Cette infection a coïncidé avec une épidémie de grippe aviaire hautement pathogène, provoquée par la même souche, affectant les volailles de Hong Kong. Des enquêtes approfondies sur cette flambée ont révélé que les contacts étroits avec des volailles vivantes contaminées étaient à l’origine de l’infection chez l’homme. Les études génétiques ont établi par la suite que le virus était passé directement des oiseaux à l’homme. Il y a eu une transmission limitée aux agents de santé, sans avoir donné de forme grave de la maladie. L’abattage rapide - en trois jours - de toutes les volailles de Hong Kong, soit environ un million et demi d’oiseaux selon les estimations, a diminué les possibilités de nouvelles transmissions directes à l’homme et pourrait avoir permis d’éviter une pandémie. Cet événement a alarmé les autorités sanitaires : c’était en effet la première fois qu’un virus grippal aviaire se transmettait directement à l’être humain et provoquait une maladie grave avec une mortalité élevée. Ces inquiétudes se sont ravivées en février 2003, lorsqu’une flambée de virus aviaire H5N1 à Hong Kong a entraîné deux cas et un décès dans une famille qui s’était récemment rendue en Chine du sud. Un autre enfant de la famille est mort au cours de cette visite, mais la cause du décès est inconnue. Deux autres virus aviaires ont récemment entraîné des maladies chez l’homme. Une flambée de grippe aviaire H7N7 hautement pathogène a démarré aux Pays-Bas en février 2003. Elle a provoqué deux mois plus tard la mort d’un vétérinaire et s’est manifestée par une forme bénigne chez 83 personnes. Des cas bénins de grippe aviaire H9N2 se sont produits chez des enfants de Hong Kong en 1999 (deux cas) et à la mi-décembre 2003 (un cas). H9N2 n’est pas hautement pathogène pour l’oiseau. C’est en janvier 2004 qu’a eu lieu l’alerte la plus récente, lorsque des analyses de laboratoire ont confirmé la présence d’un virus aviaire H5N1 chez des personnes souffrant d’affection respiratoire sévère dans le nord du Viet Nam. <>Pourquoi le H5N1 est-il aussi inquiétant ? Sur les 15 sous-types de virus grippal aviaire, le H5N1 est le plus inquiétant pour plusieurs raisons. Il mute rapidement et il a une propension avérée à acquérir les gènes des virus infectant d’autres espèces. On a établi à deux occasions sa capacité à provoquer chez l’homme de graves infections. En plus, les études de laboratoire ont démontré que les isolats de ce virus sont hautement pathogènes et peuvent être à l’origine de graves maladies chez l’homme. Les oiseaux qui survivent à cette infection, excrètent le virus pendant 10 jours au moins, par voie orale et dans les fèces, ce qui facilite sa propagation sur les marchés de volailles vivantes et par les oiseaux migrateurs. L’épidémie de grippe aviaire hautement pathogène due au virus H5N1 qui a commencé à la mi-décembre 2003 en République de Corée et que l’on observe désormais dans d’autres pays asiatiques, suscite donc des inquiétudes particulièrement vives pour la santé publique. Les variants de H5N1 ont montré leur capacité à infecter directement l’homme en 1997 et ont récidivé au Viet Nam en janvier 2004. La propagation de l’infection chez les oiseaux augmente les possibilités d’infection directe de l’homme. Si le nombre des cas d’infection humaine augmente dans le temps, la probabilité s’accroît aussi que des personnes, infectées simultanément par des souches humaines et aviaires, servent de « creuset » pour l’apparition d’un nouveau sous-type ayant suffisamment de gènes provenant du virus humain pour avoir la possibilité de se transmettre facilement d’une personne à l’autre. Cela marquerait alors le début d’une pandémie. Peut-on éviter les pandémies ? En se basant sur les tendances historiques, on peut s’attendre en moyenne à trois à quatre pandémies par siècle, avec l’émergence de nouveaux sous-types viraux se transmettant facilement d’une personne à l’autre. Mais il est impossible de prévoir le moment exact où elles surgissent. Au vingtième siècle, la grande pandémie de 1918 - 1919, qui a provoqué de 40 à 50 millions de morts dans le monde selon les estimations, a été suivie par deux autres pandémies en 1957-1958 et 1968-1969. Les experts s’accordent pour dire qu’une autre pandémie de grippe est inévitable et peut-être imminente. La plupart des experts de la grippe reconnaissent également que l’abattage rapide de toutes les volailles de Hong Kong en 1997 a probablement permis d’éviter une pandémie. Plusieurs mesures peuvent être prises pour diminuer le plus possible les risques que feraient courir à la santé publique mondiale de grandes flambées de grippe aviaire H5N1 hautement pathogène chez les oiseaux. La priorité immédiate consiste à stopper toute propagation dans les populations de volailles. Cette stratégie contribue à restreindre les possibilités d’exposition de l’homme au virus. L’administration de vaccins efficaces contre les souches humaines en circulation à ce moment-là aux personnes fortement exposées au risque d’être en contact avec des volailles infectées peut réduire la probabilité de co-infection chez l’homme par des souches aviaires et humaines et donc le risque d’échanges de gènes. Il faut aussi protéger de l’infection ceux qui travaillent à l’abattage des poulets en les équipant des habits et du matériel adéquats. Ils devraient également recevoir des antiviraux à titre prophylactique. Lorsque des cas de grippe aviaire se produisent chez l’homme, il faut d’urgence obtenir des informations sur l’étendue de l’infection chez l’animal et chez l’homme et sur les virus en circulation pour pouvoir évaluer les risques pour la santé publique et décider des meilleures mesures à instaurer. Une enquête minutieuse sur chaque cas est également essentielle. Alors que l’OMS et les membres du réseau mondial de surveillance de la grippe, ainsi que d’autres organismes internationaux, peuvent apporter leur concours à nombre de ces activités, l’endiguement des risques pour la santé publique dépend, pour réussir, des moyens en épidémiologie qu’ont les pays touchés, de leurs laboratoires et des systèmes de surveillance déjà en place. Si toutes ces activités peuvent faire diminuer la probabilité qu’émerge une souche responsable d’une pandémie, on ne peut savoir avec certitude s’il est possible de l’éviter. Evolution clinique de la grippe aviaire H5N1 chez l’homme et traitement Les informations publiées à ce sujet se limitent à l’étude des cas survenus lors de la flambée à Hong Kong en 1997. Les patients ont présenté des symptômes de fièvre, de gorge irritée, de toux et, pour les cas mortels, de troubles respiratoires sévères dus à l’infection pulmonaire virale. Des adultes et des enfants auparavant en bonne santé ainsi que des malades chroniques ont été touchés. Les tests pour diagnostiquer toutes les souches grippales de l’homme et de l’animal sont fiables et rapides. De nombreux laboratoires dans le réseau mondial de l’OMS disposent des installations d’un niveau de biosécurité suffisant et des réactifs pour les exécuter et ils en ont une grande expérience. Il existe aussi des tests rapides à pratiquer au chevet du malade pour le diagnostic de la grippe humaine, mais ils n’ont pas la précision des analyses plus complètes des laboratoires, nécessaires actuellement pour comprendre pleinement les cas les plus récents et déterminer si l’infection humaine se propage, soit directement à partir des oiseaux, soit d’une personne à l’autre. Les médicaments antiviraux, dont certains peuvent servir à la fois à la prévention et au traitement, sont efficaces contre les souches grippales A chez l’adulte et l’enfant normalement en bonne santé, mais ils ont leurs limites. Certains d’entre eux sont onéreux et l’approvisionnement est limité. On a également une grande expérience de la production des vaccins antigrippaux, en particulier parce que leur composition change chaque année pour s’adapter au glissement antigénique des virus en circulation. Toutefois, il faut au moins quatre mois pour produire en grande quantité un vaccin efficace contre un nouveau sous-type viral. @JM OMS « return. |