by Jean Wesley THOSIAC
Published on: Apr 12, 2005
Topic:
Type: Opinions

Les changement profonds survenus dans le domaine de la santé publique ont radicalement transformé la vie au cours des cent dernières années. En moyenne, les gens vivent plus longtemps et dans de meilleures conditions que jamais auparavant. Cependant, la révolution du siècle dernier en matière de santé et de bien être humain est restée inachevée, car dans bon nombre de pays, des parties importantes de la société (tels les adolescents ou les jeunes) sont l’objet de crise constantes au point de vue de leur santé. Voyons de plus près le cas des jeunes d’Haïti.

Placé 153eme sur 177 pays dans le dernier rapport du PNUD avec un indice de développement humain très bas, une espérance de vie en moyenne de 51 ans pour les hommes et 49 ans pour les femmes, ce pays, dont les résultats du dernier recensement démontrent que 20% de la population est constituée de jeunes entre 15 et 24 ans, fait face à de nombreuses crises en matière de santé. De toutes les formes de crise qui atteignent la santé des jeunes haïtiens, les IST/VIH/SIDA, les addictions et les accoutumances chimiques, la sous alimentation sont les plus frappantes.

Les faits et Causes

La déclaration de Miguel, un jeune homme de 21 ans, est plus qu’alarmante. Il affirme : « Pour moi le SIDA, est un Syndrome Inventé pour Décourager les Amoureux. C’est une pure fiction, elle est invraisemblable ». Cette déclaration vient malheureusement renforcer les données de l’UNICEF sur ce fait : plus d’un jeune sur 10 meurt avant l’age de cinq ans; plus de 200 000 enfants ont perdu l’un ou deux de leur parents à cause du SIDA, et entre 3,2 et 6, 7 pour cent des jeunes femmes de 15 à 24 ans vivent avec les IST/VIH/SIDA. Le taux de mortalité infantile et maternelle figure parmi les plus élevés de l’hémisphère. Et, malgré les multiples efforts faits par des organisations évoluant spécialement dans ce domaine, le travail reste encore rude. De plus, une forte prévalence du VIH/SIDA a aggravé l’épidémie de tuberculose (TB) en Haïti, et ceci malgré les activités de sensibilisation. Un autre jeune Sam pour sa part déclare : « Je ne me sens pas à l’aise quand je vais dans un centre où je vois aussi des vieillard… je me sens bien là où il y des jeunes comme moi ». Cette déclaration est le fruit d’un constat implicite du nombre restreint de centres de santé publique en Haïti, et surtout de ceux spécifiques aux jeunes. En outre, un phénomène qui est devenu monnaie courante c’est le nombre grandissant de jeunes appelés couramment « Moun fou » qui circulent dans les rues du pays. Ces jeunes victimes de troubles émotionnels ou affectifs se réfugient le plus souvent dans la rue. « Malheureusement des centres travaillant dans ce domaine sont presque inexistants faute de matériels » nous disent souvent des responsables.

Les jeunes filles, quand à elle, ne cessent de se plaindre d’une certaine disparité dans les mesures préventives sur les IST/VIH/SIDA, surtout concernant le condom. En Haïti, le condom masculin est quasiment gratuit, on peut s’en procurer dans des centres de lutte contre les IST/VIH/SIDA, tandis que le condom féminin doit être acheté. D’autres disent qu’elles en entendent parler, mais qu’elles n’en ont jamais vu. Ce qui rend le risque encore plus important du coté des filles.

D’autre part, c’est parmi les adolescentes que la prévalence de l’anémie sévère (moins de 7,0 g/dl) est la plus importante (5%). Globalement, les adolescentes (58%) et surtout les jeunes femmes de 15 à 24 ans (61%) sont les plus touchées. Sans oublier les problèmes de santé liés aux immondices qui joncent les rues des quartiers défavorisés, les eaux souillées etc.

Quand on essaie de trouver la cause de cette crise, on découvre que la difficulté d’obtenir de l’argent pour se soigner, la nécessité de devoir prendre un moyen de transport et la distance jusqu'à l’établissement sanitaire le plus proche sont des causes évoquées par plus de 70% des jeunes, qui les empêchent d’accéder aux soins de base même quand le besoin se fait sentir. En outre, il faut souligner d’autres obstacles importants à l’accès. Il s’agit du fait de ne pas vouloir s’y rendre seules, du manque de personnel féminin et de la nécessité d’obtenir la permission de s’y rendre.

Des mesures, oui il en faut!

Bien que cela soit difficile, il est essentiel que nous trouvions des moyens efficaces pour servir les jeunes. La multiplication des cliniques de santé spécifiques aux jeunes doit être une priorité. L’expérience nous montre que l’élaboration des services pour les jeunes exige parfois l’utilisation de techniques créatives. Par exemple, lorsqu’ils développent leurs stratégies pour servir les jeunes adultes, les professionnels de la santé devraient inclure les parents, les professeurs, les dirigeants de la communauté et les jeunes eux-mêmes. La culture des soins médicaux est aussi un manque à gagner.

En définitive, il faut retenir qu’il existe une grande plaie en ce qui attrait à la santé des jeunes en Haïti. Cette plaie est grande ouverte et attend d’être soignée, pansée, cicatrisée pour de bon,. Les jeunes ne cessent de se demander : « Quand l’objectif de la déclaration d’Alma Mati- c’est-à-dire Santé pour tous- faite par 130 gouvernements 25 ans plus tôt sera t-elle manifeste pour nous jeunes haïtiens ? Quand cette définition de la santé des jeunes sera t-elle notre : « Un état de bien être physique, psychologique et mental, spécifique à leur age, à leurs besoins sexuel et reproductif et à leur culture et pas seulement une absence de maladie ou d’infirmité » ?


Références :

Bulletin de santé # 1, Juin 2004
Profil des Jeunes Femmes et des Jeunes Hommes en Haïti résultat de l’enquête Mortalité Morbidité et utilisation des Services EMMUS-III, 200 Juin 2002
http://www.measuredhs.com/pubs/pdf/OD26/ProfildejeunesHaiti.pdf



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